Vous trouverez ci-dessous  l'argumentaire du Collectif Avortement Europe concernant la suppression de cette clause de conscience superfétatoire. 

En France, il existe une clause de conscience générale  pour tout acte médical (article R4127-47 Code de la Santé Publique) que tout médecin peut invoquer. Il existe, en outre, pour certains actes médicaux, une clause de conscience spécifique qui s’ajoute donc à cette clause générale. L’avortement en fait partie.

Le collectif « Avortement en  Europe : les femmes décident » revendique  que la clause de conscience spécifique à l’IVG, inscrite dans la loi sur l’avortement  de 1975 (L.2212-8 du Code de la santé publique), soit supprimée par le vote d’un amendement de la loi Santé en cours d’examen au Parlement. En effet, bien souvent elle constitue un obstacle supplémentaire pour les femmes qui veulent interrompre une grossesse, ce dont s’alarment des instances internationales et nationales.

Le 14 février 2017, le Parlement Européen   dans la Résolution sur la promotion de l'égalité des genres en matière de santé mentale et de recherche clinique vote : 44. qu’ il « est d’avis que les droits sexuels et génésiques englobent l’accès universel et ouvert à un avortement légal et sûr, une contraception fiable, sûre et abordable ainsi que l’éducation sexuelle et relationnelle exhaustives » ;

46. qu’« estime que le nombre croissant de médecins qui refusent de réaliser des avortements dans les États membres constitue une nouvelle menace pour la santé et les droits des femmes ; prie les États membres de veiller à ce que les hôpitaux comptent au moins un nombre minimal de professionnel.le.s de santé habilité.e.s à réaliser les avortements » ;

En France le Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes recommande dès 2013 la suppression de la double clause de conscience sur l’IVG ( Rapport relatif à l’accès à l’IVG dans les territoires, 7 novembre 2013)

En outre, en 2013 toujours,  l’OMS ( Avortement sécurisé : Directives techniques et stratégiques à l’intention des systèmes de santé, 4.2.2.5 Objection de conscience)  précise bien que tout médecin qui refuse de pratiquer un avortement pour objection de conscience doit adresser la femmes à un autre prestataire  : Certains professionnel.le.s de la santé se refusent parfois à pratiquer l’avortement pour objection de conscience, sans pour autant adresser la patiente à un autre prestataire. En l’absence d’un prestataire de services d’avortement facilement disponible, cette pratique peut retarder les soins pour les femmes nécessitant un avortement sécurisé, ce qui augmente les risques pour leur santé et leur vie.

Bien que le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion soit protégé par les lois internationales sur les droits de l’homme, ces lois stipulent aussi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction ne peut faire l’objet de restrictions nécessaires à la protection des droits fondamentaux d’autrui . Par conséquent, les lois et les réglementations ne donnent pas aux prestataires et aux établissements le droit d’entraver l’accès des femmes aux services de santé légaux.  Les agents de santé qui invoquent l’objection de conscience ont l’obligation d’adresser la patiente à un autre professionnel consentant et qualifié du même établissement, ou d’un établissement facilement accessible, en accord avec les lois nationales. Quand ce transfert n’est pas possible, l’agent de santé a l’obligation de pratiquer l’avortement pour sauver la vie de la femme ou pour prévenir tout effet néfaste sur sa santé. Les services de santé doivent s’organiser de telle manière que l’exercice effectif du droit à la liberté de conscience des personnel de santé dans le cadre professionnel n’empêche pas les patientes d’accéder aux services auxquels elles ont droit en vertu de la législation applicable. »

Maintenir cette double clause de conscience  signifie que :

- l’IVG n’est pas considérée comme un acte médical comme un autre puisque justifiant d'une clause de conscience spécifique,

- que le droit à l’IVG en France n’est pas un droit à part entière

- que certain.e.s professionnel.le.s sont exempté.e.s d’appliquer la loi au nom de leur conscience . Pourtant ce ne sont pas les femmes qui doivent s’adapter mais bien le ou la professionnel.le qui doit s’adapter à la décision de la femme prise en toute conscience.

Par ailleurs, l’exercice en gynécologie obstétrique inclut la totalité des actes concernant la santé sexuelle et reproductive, y compris l’IVG. L’exemple du Royaume Uni montre qu’il est possible pour un recrutement au service national de Santé, d’exiger que le.la candidat.e s’acquitte de toutes les missions qui lui sont dévolues, y compris celles liées à l’IVG. La clause de conscience spécifique ne doit pas être une entrave à l’IVG. Ainsi, en France, une femme, sans réponse rapide à sa demande d’IVG, pourrait faire appel à la loi Neiertz de 1993 qui a créé un délit d’entrave à l’IVG.

Il faut que toute disposition culpabilisante et stigmatisante disparaisse car chaque femme à laquelle un médecin envoie comme message « ma conscience prime sur la vôtre » se sent rejetée et dévalorisée/méprisée. Pourtant, l’avortement est un événement courant dans la vie des femmes puisqu’une  femme sur trois en France aura recours à l’IVG dans sa vie. L’égalité entre les personnes ne peut passer par la domination du choix du.de la professionnel.le. La posture professionnelle inclut l’empathie et l’assistance bienveillante.

Le collectif « Avortement Europe : les femmes décident ! » rappelle que les droits sexuels et reproductifs sont des droits humains fondamentaux dont chaque femme doit pouvoir bénéficier sans entrave.

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