Le 22 octobre, le Tribunal constitutionnel polonais a jugé que la loi sur l'avortement était inconstitutionnelle, annulant ainsi la possibilité pour les femmes d'avoir accès à l’avortement en raison d'une grave malformation fœtale. Cette mesure cruelle et régressive a été rendue possible par l'érosion délibérée de l'État de droit et des valeurs démocratiques dans le pays par le PiS, parti au pouvoir, qui a placé des juges nommés par la classe politique au sein d'un organe dont la fonction légitime est précisément de faire respecter l'État de droit. Cette décision n'est que la première manifestation concrète de la manière dont la situation actuelle en Pologne permet au PiS de violer les droits humains.
La décision de ce jour supprime automatiquement le seul motif qui permettait encore aux femmes polonaises d’accéder concrètement à des soins d'avortement pour raisons thérapeutiques. Ce résultat sera angoissant pour les femmes et leurs familles, forçant les femmes soit à poursuivre leur grossesse contre leur gré, y compris en cas de malformation fœtale fatale ou grave, soit à se rendre à l'étranger pour y recevoir des soins si elles en ont les moyens financiers, et pour celles qui ne le pourront pas, à recourir à un avortement clandestin. Cette décision augmentera inutilement les souffrances des femmes déjà confrontées à des situations très difficiles. Ce traitement inhumain et dégradant a été décrit par la Cour européenne des droits de l’homme[1] comme équivalant à une torture pour les femmes concernées.
Cet acte de coercition en matière de santé reproductive est conforme au programme du parti PiS au pouvoir en Pologne, qui continue avec zèle à monter des attaques contre les droits et la liberté des femmes en matière de procréation. Or l'opinion publique polonaise n'est pas favorable à l'interdiction de l'accès des femmes à l’avortement. La Commission européenne a déjà exprimé de sérieuses préoccupations concernant les violations de l'État de droit en Pologne, et a proposé de subordonner le financement de l'UE aux États membres au respect de cette valeur communautaire. "En ce triste jour, alors que nous pleurons la fin de de la dernière possibilité d’accès à l'avortement pour les Polonaises, nous appelons les États membres de l'UE à soutenir cette mesure visant à protéger les valeurs de l'UE, et à condamner fermement ces violations flagrantes des droits humains en Europe. La décision prise aujourd'hui en Pologne illustre de manière frappante ce que la population polonaise risque de perdre", a déclaré Irene Donadio, de l'IPPF EN.
Malheureusement, en plus de marquer une journée dévastatrice pour la sécurité des femmes en Pologne, le 22 octobre pourrait également voir les antichoix affirmer leur haine des femmes et des personnes LGBTI au niveau international par la signature d’un document grotesque proposé par Donald Trump à plusieurs gouvernements du monde entier menant des politiques régressives, dont la Pologne et la Hongrie. Ce document sans base juridique[2] tente de défier le consensus international en faveur de la santé et des droits sexuels et reproductifs.
Enfin, ce jour pourrait également être celui où les États-Unis confirmeront à la Cour suprême Amy Coney Barrett, connue pour ses positions anti-avortement.
[1] R. R. c. Pologne : https://hudoc.echr.coe.int/eng#{"itemid":["001-104911"]} [2] https://www.independent.co.uk/news/world/americas/trump-administration-geneva-consensus-abortion-b1184688.html